Résumé du dossier d'inconduite CPPM‑2017‑028

À la fin de juin 2017, la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire (CPPM) a reçu une plainte d’un policier militaire (PM) anonyme sur de nouvelles restrictions à l’égard de l’exercice des pouvoirs d’agents de la paix des PM.

Une nouvelle directive stratégique indiquait, que lorsqu’un policier militaire se retrouve en présence d’une personne sur une propriété militaire en situation de crise de santé mentale, et qui entretient des idées suicidaires, le PM doit s’éloigner à une distance sécuritaire et contacter les services de police locaux, pour que ceux-ci interviennent. En vertu de la législation provinciale sur la santé mentale, la police civile dispose du pouvoir d’appréhender la personne et de l’emmener à l’hôpital pour se faire soigner. Le plaignant a soutenu que cette méthode était à l’opposé du devoir de la PM de protéger la vie, en vertu de la common law. La difficulté, comme le signale la nouvelle politique de la PM, tient au fait que les PM disposent généralement uniquement des pouvoirs d’agents de la paix et de policiers à l’échelon fédéral, tandis que la santé mentale est régie par des lois provinciales.

La directive stratégique de la PM prévoit toutefois, qu’au besoin, les PM dans une situation de ce genre peuvent utiliser leurs pouvoirs d’arrestation de la façon suivante : un membre des FAC peut être arrêté pour l’infraction d’ordre militaire « simulation de maladie »; un civil peut être arrêté pour avoir « troublé la paix » en vertu du Code criminel du Canada. Or, le plaignant s’oppose que cette façon de faire est insatisfaisante, puisque le PM doit avoir des motifs, subjectifs et fondés, de croire que la personne est en train de commettre un crime ou est sur le point de le faire avant de l’arrêter. De plus, cette arrestation ne mènerait pas à l’obtention des soins médicaux dont la personne a besoin.

Le plaignant s’est aussi opposé à la directive selon laquelle les PM ne doivent plus intervenir dans des incidents à l’extérieur de la base. Un nouvel ordre du Groupe de la police militaire des Forces canadiennes (Gp PM FC), qui remplace des dispositions des Consignes et procédures techniques de la Police militaire, indique qu’il n’y a plus d’exception liée aux attentes du public à l’égard des PM en uniforme, qui peuvent intervenir dans certaines situations d’urgence à l’extérieur de la base, même s’ils ne disposent pas des pouvoirs juridiques d’un agent de la paix.

Le plaignant anonyme a précisément demandé à la CPPM de mener une enquête d’intérêt public dans cette affaire. En ce saisissant de ce dossier « dans l’intérêt public » en vertu de l’article 250.38 de la Loi sur la défense nationale (LDN), la CPPM pourrait entreprendre immédiatement une enquête (au lieu de renvoyer le dossier au Grand Prévôt des Forces canadiennes, pour le traitement initial, dans le cas d’une plainte concernant la conduite d’un PM) et s’il est fondé de le faire, de tenir des audiences publiques. La CPPM devait tout d’abord déterminer si la plainte relève de sa compétence au titre d’une plainte valide pour inconduite ou ingérence de la PM.

Après avoir soigneusement étudié le dossier et mené des recherches, la CPPM a conclu que cette plainte, même si elle soulève des questions importantes en matière de police militaire au Canada, ne constitue pas une plainte valide pour inconduite ou ingérence de la PM.

En ce qui concerne la compétence de la CPPM relativement à la plainte d’inconduite, la Partie IV de la LDN limite la notion de plainte pour inconduite à l’exercice des fonctions de nature policière par le PM, tel que défini dans les règlements subséquents à l’alinéa 250.18(1) de la LDN. Bien que la directive stratégique de la PM concernée aborde des questions liées à l’exécution des fonctions de nature policière, l’acte de formuler une directive stratégique a été jugé comme étant de nature administrative, plutôt qu’opérationnel, et est par conséquent expressément exclu de la portée des questions qui peuvent faire l’objet d’une plainte pour inconduite en vertu de la sous-section 2(2) du Règlement sur les plaintes portant sur la conduite des policiers militaires.

En ce qui concerne le mandat de la CPPM relatif à l’ingérence, il a été déterminé qu’une plainte pour ingérence en vertu de l’article 250.19 de la LDN doit être liée à une ingérence où à une tentative d’ingérence dans l’enquête concrète ou éventuelle d’un incident en particulier, au lieu de simplement porter sur la conduite d’enquêtes futures dans l’abstrait.

Étant donné ces conclusions sur sa compétence dans cette affaire, la CPPM n’a pas été en mesure d’étudier l’effet de l’exercice de son autorité pour faire tenir une enquête ou une audience d’intérêt public. La CPPM a toutefois transmis la plainte au GPFC pour l’informer et pour qu’il puisse prendre les mesures qu’il juge appropriées.

Comme il a été noté ci-dessus, cette plainte soulève des questions importantes en matière de police militaire au Canada. D’ailleurs, la CPPM a été informée de préoccupations similaires à l’égard de la directive stratégique sur l’exercice de la compétence de la PM de la part de membres subalternes de la PM pendant ses visites de sensibilisation dans les bases dans différentes régions du pays.

Alors que la CPPM ne possède pas le pouvoir légal de mener une enquête sur les directives ou les ordres de la PM dans l’abstrait, la CPPM peut avoir la chance d’aborder ces questions dans le contexte de plaintes futures qui surviendraient à la suite de situations précises, ou dans un rapport spécial de la CPPM. Ainsi, la CPPM aura probablement plus à dire à ce sujet.

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