Résumé du dossier d'inconduite CPPM‑2012‑040

En 1984, le plaignant participait à la formation initiale d'infanterie (école de combat) en tant que nouvelle recrue des Forces canadiennes (FC). Il allègue que, dans le contexte d'un rite d'initiation alors répandu dans l'unité, on l'a fait sortir de force de sa chambre de caserne, on l'a obligé à enlever tous ses vêtements, puis on l'a attaché, nu, à une chaise dans le corridor. D'autres membres de l'unité se sont alors moqués de lui et lui ont infligé de mauvais traitements : ils lui ont mis une vadrouille sale sur la tête, ont à plusieurs reprises enfoncé un manche de vadrouille ou de balai entre ses fesses et ses jambes, par-derrière, et ont mis de la crème glacée sur ses organes génitaux.

De plus, le plaignant soutient qu'en 1985, sur la même base, il a été accosté dans le corridor par l'un des deux acteurs principaux de l'incident précédent. Cette personne a agrippé son chandail et l'a adossé au mur pendant quelque temps. Son expression faciale et son langage corporel étaient menaçants. Le plaignant indique que l'agresseur l'a finalement relâché en lui disant de prendre garde ou autre chose en ce sens.

Le plaignant a déclaré que ces deux incidents ont eu sur lui un effet très négatif et durable. Il s'est mis à consommer de l'alcool avec excès et à avoir des pensées suicidaires. Il a en outre rapporté avoir été agressé sexuellement à l'âge de 11 ans par un animateur de camp de vacances. Il a quitté les FC en 1988.

En 2006, après avoir reçu du soutien psychologique et reconnu la portée réelle de ces incidents sur sa vie, que le plaignant a signalé à la police les incidents s'étant produits à l'école de combat. Il a d'abord donné un signalement à son détachement local de la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Puisque les infractions alléguées avaient été commises sur la propriété du ministère de la Défense nationale, la GRC a décidé de renvoyer l'affaire à la Police militaire (PM), et a donc communiqué avec le détachement le plus près et s'est rendue sur les lieux en octobre 2006.

La journée suivante, compte tenu de la gravité des allégations, le détachement de la PM a transféré le dossier du plaignant au bureau de la région du Pacifique du Service national des enquêtes des Forces canadiennes (SNEFC), qui, en novembre 2006, l'a transféré au bureau de la région de l'Est (RE) en raison du lieu où les infractions ont été commises.

Le SNEFC a décidé de faire enquête sur les allégations d'agression sexuelle armée, de séquestration, de voies de fait et profération de menaces. L'enquête a duré quatre ans (de 2006 à 2010). Au cours des deux premières années, cinq membres du SNEFC ont été affectés à l'enquête. Pendant les deux dernières années, un seul enquêteur s'est chargé du dossier. Le SNEFC RE est entré en contact avec 18 anciens collègues de classe du plaignant à l'école de combat afin de vérifier leurs souvenirs des incidents. Il a mené 13 entrevues auprès de 10 témoins, y compris les deux principaux suspects mis en cause par le plaignant.

Au cours de l'enquête, le SNEFC a appris que le plaignant était préalablement entré en contact avec certains des témoins, au risque d'entacher leurs souvenirs avec les siens. Le SNEFC a demandé au plaignant de cesser cette pratique, mais il semble que celui-ci ait continué de communiquer avec les témoins avant leur entrevue avec la police.

Le dernier enquêteur du SNEFC responsable du dossier a présenté l'affaire à un procureur militaire en 2009.

La PM était liée par la loi en vigueur au moment des infractions, laquelle prévoyait alors un délai de prescription de trois ans pour déposer des accusations en vertu du Code de discipline militaire (la disposition en question de la Loi sur la défense nationale (LDN) a depuis été abrogée).

Au début de 2010, l'affaire a été présentée à un procureur civil de la province où les infractions alléguées auraient eu lieu. Dans cette province, la décision de déposer des accusations au criminel relève du procureur et non de la police. En l'espèce, le procureur a déterminé qu'une condamnation était peu probable et a décidé de ne pas déposer d'accusations en vertu du Code criminel. Le SNEFC a donc décidé de mettre un terme à l'enquête et de clore le dossier.

Après s'être penché sur les divers recours juridiques possibles, le plaignant a finalement déposé une plainte pour inconduite auprès de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire (CPPM). Dans sa plainte, il soutient que l'enquête du SNEFC aurait été délibérément « bâclée » dans le cadre d'un complot visant à protéger la réputation de l'unité impliquée dans le rite d'initiation ayant mal tourné et de ses anciens membres.

À la suite d'un examen approfondi de la plainte, la CPPM a jugé que la SNEFC avait pris les allégations criminelles historiques au sérieux, contrairement à ce que soutient le plaignant. De nombreux témoins ont été trouvés et interrogés. La PM a présenté l'affaire à un procureur militaire et à un procureur civil. Une poursuite militaire a été écartée en raison du délai de prescription applicable en vertu de la LDN au moment où les infractions auraient été commises. En ce qui concerne la décision de ne pas déposer des accusations au criminel dans le système civil, il convient de noter que dans la province en question, la décision relevait du procureur et non de la PM.

Même si certains aspects auraient pu être améliorés, l'enquête n'est pas aussi imparfaite que le suggère le plaignant. En outre, rien ne prouve que les enquêteurs de la PM aient délibérément fait échouer l'enquête.

La CPPM a constaté que les éléments de preuve rassemblés lors de l'enquête du SNEFC (enregistrements des entrevues, etc.) avaient été détruits environ deux ans et demi après la fermeture du dossier d'enquête de la PM, ce qui soulève des questions touchant l'administration et la procédure. Après avoir enquêté à ce sujet, elle a conclu que la preuve n'avait pas été détruite de manière malveillante. La CPPM a toutefois établi que d'autres services de police conservaient la preuve beaucoup plus longtemps dans le cadre d'affaires semblables. Elle a donc recommandé au Groupe de la PM des FC (Gp PM FC) de se doter de politiques correspondant davantage à celles de ses homologues civils.

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